Résumé : comment fait-on pour dessiner un caractère sur une imprimante ou l’afficher sur un écran ? Les possesseurs de micro-ordinateurs se servent des polices de caractères souvent, sans savoir comment elles sont définies.
Mots-clés : typographie, arrobe, perluète, fonte, interpolation, Bézier.
L’exercice s’inspire de plusieurs sites Internet Truchet & Types de Jacques André, Denis Giroud, Irisa, Arrobe (arobe) de Alis Technologies, etc.
C’est à Lyon qu’est né, en 1657, le père Sébastien Truchet ; il a joué un rôle fondamental dans l’histoire de la typographie en concevant notamment la première fonte numérique le Romain du Roi.
Le père Sébastien Truchet a été nommé par Louis XIV pour participer aux travaux de la commission Bignon en vue de la préparation d’une encyclopédie sur les métiers, le premier qu’ils étudient étant celui d’imprimeur !
La commission se met alors dans l’étude des caractères existants et trois membres se lancent dans la conception « de nouvelles lettres françaises, que l’on a tâché de rendre les plus agréables à l’œil qu’il fût possible. » Ces caractères Romain du Roi rompent avec la tradition du Garamond et leur originalité est la suivante : ce sont des caractères influencés par l’idée que « l’imprimerie n’est pas une branche de l’écriture mais de la gravure. »
L’apport du mécanicien Truchet est prépondérante. Ces notes manuscrites sont l’équivalent des AFM (Font Metrics) d’aujourd’hui, voire des instructions de hinting. Jacques André et Denis Giroud insistent sur le génie des chercheurs d’il y a trois cents ans :
Le Romain du roi a tout d’une fonte numérique d’aujourd’hui, mais elle a trois cents ans !
Autre surprise : le signe @ est vieux de plus de 500 ans. Ce symbole est désormais omniprésent dans les communications via Internet ; il est utilisé pour les adresses électroniques. Le professeur Giorgio Stabile de l’université de Sapienza dit avoir trouvé le plus ancien exemplaire du symbole @, utilisé comme mesure de poids ou de volume. Il dit que ce signe représentait une amphore, ancienne mesure de capacité basée sur les jarres en terre cuite utilisées pour transporter le blé dans l’antique monde méditerranéen.
La première apparition connue du symbole est une lettre écrite par un marchand florentin le 4 mai 1536, envoyée de Séville à Rome par un négociant nommé Francesco Lapi ; elle décrit l’arrivée en Espagne de trois bateaux transportant des trésors d’Amérique latine : « Une amphore de vin, d’un tiers de baril, valant 70 ou 80 ducats. » Lapi écrit « amphore » au moyen du symbole « a » entouré de sa propre queue.
Le mot espagnol pour @, arrobas, désigne un poids ou une mesure, valant à la fin du XVIe siècle 11.3 kg ou 27.2 litres.
« Jusqu’à présent personne ne savait que le symbole @ était dérivé du symbole utilisé par les marchands italiens entre le moyen-âge et la renaissance... »
Le professeur explique que le signe, connu des cybernautes italiens comme la chiocciola (l’escargot), a effectué son chemin le long des routes commerciales vers l’Europe du nord où il a pris sa signification actuelle : « at the price of. »
Souhaité sur le clavier des machines à écrire anglaises, le signe a été choisi comme symbole rarement utilisé pour séparer le nom du domaine par l’ingénieur américain Mr Ray Tomlinson.
« Aucun symbole n’est né par hasard. Celui-ci représente l’histoire de la navigation sur les océans et est devenu le symbole des voyages dans le cyberespace. »
Une autre version explique l’origine du symbole : celle d’Alis Technologies inc.. En français on utilise le mot arrobe (arobe), n.f. terme normalisé (ISO 10646) désignant le signe « @ ». Le Lexis orthographie arrobe avec un seul « r ».
Ce signe est également parfois appelé arobas, ou arrobas. On l’appelle également a commercial par analogie avec le nom populaire de la perluète (@) e commercial bien que son utilisation aujourd’hui soit principalement informatique. En Belgique, on parle également d’un a crolle (une « crolle » désignant une boucle de cheveu outre-Quiévrain). Ginguay, dans son Dictionnaire anglais-français d’informatique (11e édition, Masson éditeur) mentionne également pour ce signe : « escargot ».
Tout comme la perluète, ce caractère est issu des chancelleries : il s’agit de la ligature latine de ad (« a » en français) où le a et le d cursifs de l’onciale (ad penché vers l’avant) ont fini par se confondre.
Jusqu’à récemment, ce caractère n’était utilisé aux Etats-Unis qu’en comptabilité pour indiquer le prix unitaire : ainsi « deux livres à 1 dollar la pièce » s’écrit sur une facture « 2 books @ $1 ».
Le nom le plus fréquemment employé en France, du moins dans les milieux universitaires, pour désigner ce symbole est « arrobas ». Ce mot proviendrait d’une confusion avec le symbole d’une unité de poids espagnole (arroba, poids de 25 livres espagnoles, soit 11,502 kg, dont le nom en français est arobe ou arrobe). Le Petit Robert donne une autre valeur à arrobe : 12,780 kg. Ce même mot vient de l’arabe ar-roub (le quart, famille de arba’ quatre).
On peut profiter de cette définition pour indiquer également ce qu’est une perluète (éperluète ou esperluète). C’est la ligature des lettres « e » et « t ». C’est aussi la figure du nœud, et le symbole de l’union. Au XIXe, la perluète devient le & commercial, qui lui donne sa forme la mieux connue. Dans les années 50, au moment où les techniques de photocomposition remplacent la composition traditionnelle avec les caractères en plomb, la survie de la perluète est très compromise. Elle est heureusement défendue par Maximilien Vox (le fondateur des Rencontres de Lure) qui y voit la « pierre de touche de l’influence de l’esprit calligraphique sur la typographie. »
Les formes de la perluète sont innombrables, d’une infinie variété. Un seul calligraphe pouvait se permettre de créer de nombreuses formes dans une même page, on la voit même terminer les mots, c’est-à-dire sortir de sa seule fonction grammaticale liée à l’expression de la conjonction. On est donc tenté de croire que son usage est lié à l’esprit créatif. Tous les calligraphes et les grands créateurs de caractères ont perpétué cette tradition.
La revue Arts&Métiers du Livre a publié une étude de Paul Standard, calligraphe américain à qui l’on doit le regain d’intérêt pour la calligraphie latine. Dans cet article, qui date de 1938, Paul Standard s’intéressait particulièrement aux caractéristiques de la perluète dans différents pays. Il distingue les grands calligraphes de la Renaissance italienne : Arrighi, Tagliente, Palatino qui rayonnèrent au travers de manuels d’écriture qui se sont diffusés dans toute l’Europe. Les perluètes issues de cette influence débordent d’astuce, de créativité, de liberté qui contrastent fortement avec les perluètes en usage en Angleterre.
Les maîtres d’écriture anglais du XVIIIe siècle comme Shelley ou Champion, pouvaient tracer des formes ornementales florissantes, mais leurs moyens d’existence dépendant de l’enseignement de l’écriture commerciale utilisée pour la tenue des livres de comptes, ils mirent au point des tracés plus simples et pratiques pour accompagner les alphabets qui les contenaient.
En France, les maîtres d’écriture, tel Barbedor, firent du XVIIe le siècle de la perluète. Elle était dépouillée de toute fioriture, plus austère et plus belle que précédemment.
Le but de l’exercice consiste à faire représenter par un ordinateur un caractère comme, par exemple, l’arrobe ou la perluète en utilisant les courbes de Bézier.
Pour définir un caractère sous forme de courbes de Bézier, il faut spécifier un certain nombre de points appartenant au contour puis donner des informations sur les tangentes en ces points (direction et norme) ; certains points sont des points de rebroussement, ils ne disposent pas de tangente. Il faut ensuite représenter la courbe de Bézier passant par ces points (on pourra consulter avec intérêt le problème qui traite des courbes de Bézier).
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